La semaine dernière, le Premier ministre François Bayrou a présenté les grandes lignes de son budget pour 2026, avec deux objectifs affichés : 43,8 milliards d’euros d’économies et un déficit ramené à 4,6% de PIB dès l’année prochaine.
Pour y parvenir : la fameuse « année blanche », une coupe généralisée à l’ensemble des ministères (à l’exception notable du ministère des Armées), des opérateurs de l’État et des collectivités. Côté dépenses sociales, le gouvernement insiste sur la « responsabilisation » des patients, avec une réforme du remboursement des médicaments dans le cadre des affections longue durée (ALD). Mais c’est bien la proposition de supprimer deux jours fériés, mesure « chiffon rouge » par excellence, qui a fait le plus réagir parmi la classe politique et dans l’opinion.
Un choix qui a pu surprendre, à l’heure où la recherche d’un compromis parlementaire s’impose. François Bayrou sait cependant qu’il ne joue pas seulement sa survie à Matignon, mais bien son crédit politique personnel pour conserver la mairie de Pau en 2026 (qu’il a continué d’occuper jusqu’au bout malgré les critiques) et viser, pourquoi pas, l’Elysée en 2027.
C’est la raison pour laquelle il mise sur le courage, en proposant un budget audacieux, dont la présentation avait presque des allures de manifeste personnel. Sous le slogan « Le moment de vérité », avec un ton particulièrement grave et solennel, le Premier ministre y a multiplié les références à ses engagements et à sa destinée politique. Autre indice : malgré les appels nombreux à les faire contribuer davantage, le budget épargne relativement les retraités et les plus hauts revenus, cœur de l’électorat du bloc central qu’il pourrait espérer conquérir.
François Bayrou pourrait ainsi faire le choix de « l’anti-Barnier » : quitter la scène avant le jeu de massacres de l’Assemblée nationale et laisser en héritage un projet de budget courageux, pour espérer compter parmi les nombreux prétendants du socle commun à la magistrature suprême. En coulisses, on dit que Sébastien Lecornu se prépare déjà à reprendre le flambeau en cas de démission du Premier ministre.
La perspective d’une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale, semble quant à elle à écarter. On imagine mal le Président de la République prendre de nouveau ce risque après les lourdes conséquences de la précédente sur la croissance, la confiance des acteurs économiques et la perception des Français.
Ce projet de loi de finances 2026, dont l’examen aura lieu six mois avant les municipales 2026, et un an et demi avant la présidentielle 2027, sera éminemment politique. Il sera un budget de symboles, où chacun aura à cœur de jouer sa partition et d’esquisser des lignes rouges comme préfiguration des grandes échéances électorales à venir.
La réaction d’Édouard Philippe, qui en a profité pour défendre son triptyque « travailler plus, dépenser moins et taxer moins » et pointé l’absence de « réformes structurelles » en dit long. Tout comme celle de Bruno Retailleau, qui prône un budget « juste », en proposant la révision de l’Aide médicale d’État (AME) et prend encore davantage ses distances avec le macronisme.