Le 16 octobre 1975, le roi Hassan II annonçait au monde la Marche Verte, cette épopée pacifique par laquelle 350 000 volontaires marocains allaient traverser le désert pour réclamer la fin de la présence coloniale espagnole. Le 6 novembre 1975, des milliers d’hommes et de femmes s’élancent effectivement dans les sables du Sud, coran et branche d’olivier à la main, pour marcher trois jours durant. Par son ampleur et sa portée symbolique, l’événement convainc l’Espagne de signer, le 14 novembre 1975, les accords de Madrid, qui fixent les modalités de son retrait des provinces sahariennes. Une étape décisive dans le processus de récupération du Sahara, mais qui n’était encore que le prélude aux épreuves et aux enjeux qui allaient suivre.
Cinquante ans plus tard, presque jour pour jour, le calendrier semble vouloir refermer la boucle. Le 31 octobre 2025, le Conseil de sécurité adopte la résolution 2797, mettant un terme à plus d’un demi-siècle de gel du dossier du Sahara aux Nations-Unies. Par onze voix pour et trois abstentions, la communauté internationale entérine un tournant historique : dans ce texte, l’ONU affirme qu’« une véritable autonomie sous souveraineté marocaine pourrait constituer une solution des plus réalistes et durables ».
Concrètement, cela signifie que les Nations unies considèrent aujourd’hui que la proposition marocaine d’autonomie du Sahara, présentée en 2007 comme une voie médiane entre intégration totale et indépendance, constitue la solution la plus réaliste et la plus crédible pour parvenir à un règlement définitif de ce dossier. Une victoire diplomatique majeure pour le Maroc, dont la position équilibrée et pragmatique s’impose aujourd’hui comme l’option privilégiée. Cette approche réaffirme à la fois les droits historiques légitimes du Royaume sur son Sahara, tout en garantissant aux populations locales un rôle central dans la gestion de leurs affaires et la construction de leur avenir.
Pour les observateurs avertis du dossier du Sahara, cette reconnaissance onusienne ne relève pas du hasard. Depuis plusieurs années, un mouvement international de fond s’est affirmé en faveur de l’intégrité territoriale du Maroc : de nombreux États, autrefois proches du Polisario, ont progressivement rallié la position marocaine, saluant la pertinence et la crédibilité de l’initiative d’autonomie. Avec la reconnaissance des États-Unis en 2020, le processus s’est nettement accéléré, entraînant à sa suite des soutiens en cascade, y compris parmi certains membres influents du Conseil de sécurité, tels que la France et le Royaume-Uni. Parallèlement, les investissements étrangers se multiplient dans les provinces du Sud, consolidant la dynamique de développement et d’ouverture que connaît la région. Il s’agit, en définitive, de l’aboutissement naturel d’une évolution constante du dossier, désormais clairement orientée en faveur du Royaume.
Le Maroc récolte aujourd’hui les fruits d’un long et patient combat. Depuis 1956, le Royaume n’a cessé de défendre son intégrité territoriale, dans les enceintes les plus hostiles comme sur les scènes diplomatiques les plus éloignées. Optant pour une diplomatie des petits pas, le Maroc a avancé progressivement, consolidant chaque victoire, même modeste, pour asseoir sa position à l’échelle internationale. Fort de la justesse de sa cause, il a su convaincre État après État, région après région, continent après continent. Cette reconnaissance onusienne représente le plus grand saut de cette stratégie, consacrant des décennies d’efforts ininterrompus, portés par un État, un Roi, un peuple et une diplomatie unis par la même détermination à ne jamais céder ni au doute ni à la fatalité.
Cette victoire, à juste titre célébrée, ne doit toutefois pas occulter les étapes encore à franchir pour transformer ce succès diplomatique en réalité concrète. La première consiste à définir clairement les contours de la solution d’autonomie : il s’agit de traduire une idée en dispositif opérationnel, en précisant notamment les pouvoirs délégués aux régions et les institutions qui y seront créées. Le Maroc a déjà posé les jalons grâce à sa régionalisation avancée ; il s’agira désormais d’aller plus loin, en s’inspirant d’exemples de régions autonomes dans le monde pour élaborer un modèle crédible et fonctionnel.
Ce cadrage précis pourrait également constituer un argument décisif pour convaincre l’Algérie de déposer la hache de guerre, si elle estime que les droits des Sahraouis sont suffisamment protégés dans la version proposée par le Maroc. On pourrait alors espérer qu’Alger cesse de défendre la création d’un État indépendant.
Une fois ce cadre défini, l’évolution du rôle de la MINURSO pourrait également être envisagée, passant d’une mission de maintien du cessez-le-feu à un rôle de surveillance de la mise en œuvre effective de l’autonomie, garantissant ainsi la stabilité et la crédibilité du processus.
Ensuite, il faudra s’assurer que cette résolution soit pleinement appropriée par la communauté internationale, notamment par les grands ensembles régionaux. L’Union africaine devra retirer la RASD de ses rangs en tant qu’État membre, tandis que l’Union européenne devra aligner sa politique sur la reconnaissance du Sahara marocain, après que certains arrêts récents de la CJUE aient porté atteinte aux intérêts du Royaume. Parallèlement, il conviendra de procéder au retrait du « Sahara occidental » de la liste des 17 « territoires non-autonomes » auprès des Nations unies, en coordination avec la 4ᵉ Commission (Commission spéciale des Nations-Unies chargées des questions de décolonisation). Enfin, le retour des Sahraouis actuellement emprisonnés à Tindouf dans leur patrie restera un objectif essentiel de ce processus, afin de concrétiser la réconciliation et la paix durable dans la région.
« Le véritable travail commence maintenant » a commenté hier Stafan de Mistura, l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU » pour le Sahara. Pour le Maroc, c’est le travail amorcé hier qui se poursuit !


