Quelle est la position des pays du Golfe vis-à-vis de la guerre Israël-Iran ?

27.06.2025 - Regard d'expert

Les États du CCEAG (Conseil de coopération des États arabes du Golfe) sont actuellement embarrassés :

D’un côté l’affaiblissement de l’influence iranienne dans la région et la réduction des capacités nucléaire et balistique de l’Iran les satisfont, même s’ils ne le disent pas ouvertement.

D’un autre côté, ils craignent un embrasement dans la région, qui ferait fuir les investisseurs internationaux, alors qu’ils cherchent précisément à les attirer pour financer leurs grands projets économiques, qui sont leur véritable priorité.

Par ailleurs, bien qu’ils se méfient toujours du régime iranien, ils ont repris langue avec lui et ils craignent – s’il est poussé à bout – de subir ses attaques sur leurs territoires contre les facilités accordées aux Américains.

En outre, ils ne voient pas d’opposition organisée susceptible de prendre le pouvoir à Téhéran et craignent le chaos en Iran et dans le Golfe, car ils pensent que les Gardiens de la Révolution défendront le régime. Le précédent malheureux de l’invasion de l’Irak est dans leurs esprits.

Ils sont également perturbés par les changements d’avis du président Trump, à qui – lors de sa visite dans le Golfe le mois dernier – ils avaient dit clairement qu’ils souhaitaient éviter une confrontation israélo-iranienne susceptible d’embraser la région. Ils pensaient avoir été entendus et s’interrogent donc sur la fiabilité des engagements du président américain.

Enfin, s’ils sont satisfaits du reflux de l’influence iranienne dans la région, ils ne souhaitent pas voir apparaître un nouvel impérialisme – israélien cette fois – étant donné les méthodes expéditives de Netanyahou.

Les pays du Golfe espèrent donc que les pressions militaires israélienne et américaine contraindront le régime iranien à compromettre – afin d’assurer sa pérennité – évitant ainsi une confrontation étendue à la région. Leur position est donc convergente avec les appels européens à la désescalade et à la reprise des négociations irano-américaines. Mais ils craignent que le président Trump soit manipulé par M. Netanyahou, dont l’intransigeance sur le dossier palestinien les inquiète à juste titre.

Si les Américains s’engageaient directement dans le conflit, il faut s’attendre à ce que les pays du Golfe fassent tout pour éviter d’être impliqués et limitent leur réaction à des appels à la retenue et à la négociation.

Mais si le régime iranien  s’effondrait, ils exprimeraient alors leur souhait d’une coopération avec le nouveau régime, dans l’intérêt bien compris des deux rives du Golfe.

Bertrand Besancenot
Bertrand Besancenot est Senior Advisor au sein d’ESL Rivington. Il a passé la majorité de sa carrière au Moyen-Orient en tant que diplomate français. Il est notamment nommé Ambassadeur de France au Qatar en 1998, puis Ambassadeur de France en Arabie Saoudite en 2007. En février 2017, il devient conseiller diplomatique de l’Etat puis, après l’élection d’Emmanuel Macron en tant que Président de la République, Émissaire du gouvernement du fait de ses connaissances du Moyen-Orient.